Mansuétude ou complicité !

La communauté internationale est restée  aphone sur le déroulement de la Transition politique au Gabon. Il n’est pas osé de dire qu’elle y a créé un petit laboratoire d’expérimentation de coup d’Etat militaire légitimé dans les urnes. Toutes les violations des traités et accords internationaux semblent avoir été autorisées. L’ONU, l’ONUCA, la CEMAC, la CEEAC, l’OIF, l’Union Africaine, l’Union européenne, tout le monde est resté muet face au spectacle inouï du déroulement du processus de transition politique au Gabon. De là à ce que d’autres exemples suivent, cela n’étonnerait personne. Le Gabon aurait ouvert la voie, d’autres militaires pourront s’y engouffrés.

 Des militaires qui s’installent durablement au pouvoir après avoir perpétré un coup d’Etat, c’est-à-dire une conquête dudit pouvoir par des voies anticonstitutionnelles, cela  a déjà été vécu en Afrique et partout ailleurs dans le monde, mais dans des concerts de réprobations et de condamnations généralisés.

 Les chantres de la démocratie, de l’Etat de droit et des libertés fondamentales, la France, les Etats-Unis d’Amérique et autres pays occidentaux s’en sont toujours donnés à coeur joie. Les juntes militaires malienne, Burkina-bê, nigérienne et guinéenne en savent quelque chose, elles qui ont dû subir les foudres de ces donneurs de leçons, exportateurs attitrés des valeurs de la démocratie et de liberté. Ces juntes militaires ont dû couper les ponts, et de manière brutale, avec eux afin de sortir de leur tutelle idéologique qui masque assez mal un asservissement et un avilissement de certains Pays africains vis-à-vis des pays occidentaux ,et qui font l’affaire  cet Occident judéo-chrétien depuis des siècles.

 Sur le continent noir, les pays occidentaux ont toujours fait le choix de bons et mauvais dictateurs, les premiers servant leurs intérêts. Ils y ont investi Jean Bedel Bokassa comme empereur de Centrafrique, entretenu des dictateurs de la trame de Mobutu, Houphouët Boigny, Bongo, tout en combattant fermement, jusqu’à les assassiner, les Kwamé Nkrumah, Patrice Emery Lumumba, Sékou Touré, Thomas Sankara et bien d’autres encore qui voulaient s’affranchir de l’impérialisme. Aujourd’hui, ils sont vent debout contre les Assimi Goita, Ibrahim Traoré, Abdourahamane Tchiani, tout en regardant d’un bon œil ce qui se passe au Gabon

Le 30 août 2023, il y a eu un coup d’Etat militaire dans le pays, même si on l’a maquillé en « coup de libération », sans savoir des mains de quel occupant étranger le pays a-t-il été libéré. S’il s’agit de la dynastie des Bongo, ceux qui ont perpétré ce coup en font eux-mêmes partie. Il est difficile de parler dans ce cas de « libération », surtout lorsqu’on sait que toute la cour de noblesse a été rétablie dans ses attributs. Tous les suzerains et autres valets sont là et continuent de bénéficier de leurs prébendes.

A l’annonce de ce coup d’Etat militaire, une restauration des institutions républicaines a été promise. Deux ans après, aucune de ces institutions n’a été restaurée. On a plutôt pris les mêmes et on a recommencé. La Constitution élaborée et adoptée dans la foulée par voie référendaire a plutôt consacrée une hyper- présidentialisation du régime, le Président de la république devenant plus qu’à l’époque des Bongo père et fils omniprésent, omniscient et omnipotent. Il n’y a même plus de semblant de séparation des pouvoirs. Personne n’a trouvé rien à redire au plan international. Le fait que les militaires aient renoncé à leur promesse solennel de rétrocéder le pouvoir aux civils à la fin de la Transition est passé contre une lettre à la poste, motus et bouche cousue.

Cerise sur gâteau, les mêmes militaires ont décidé de quitter leurs casernes et entrer dans l’arène politique en se donnant le droit de se porter candidat à des élections politiques. Un fait inédit dans le monde entier. Là également silence- radio de la part de la nébuleuse communauté internationale, comme si on avait coupé la langue à tout le monde ; alors que la charte africaine de la démocratie est formelle là- dessus : les auteurs de toute prise de pouvoir par des voies non constitutionnelles ne peuvent se porter candidats à des élections qui suivent la transition. Quant à l’OIF, elle suspend immédiatement, sans conditions et négociations préalables, de son organisation tout pays ayant enregistré un coup d’Etat. Cela n’a guère été le cas en ce qui concerne le Gabon

Le paroxysme de cette mansuétude vient d’être atteint avec la tenue de l’élection présidentielle censée mettre un terme à la transition. Les premiers résultats annoncés par le ministre de l’Intérieur jettent un discrédit total sur ce scrutin. Il s’est agi d’un plébiscite  couronné par un score à la soviétique certes. Cependant, les pays occidentaux et les organisations internationales qu’ils contrôlent sont-ils devenus tout à coup admiratifs des pratiques qui avaient cours dans l’ancienne Union des Républiques Soviétiques et soviétiques (URSS), au point de trouver qu’un tel chiffre honore une démocratie et qu’il est la traduction d’une transparence électorale ?

 Et Lorsque ces chiffres ont été revus et corrigés, n’ont-ils pensé qu’il s’est agi d’une distribution, ou d’une attribution, hors urnes, des suffrages à tel ou tel candidat par le Ministre de l’Intérieur ?

 La ficelle n’a-t-il pas été trop grosse pour ne pas être perçue par la communauté internationale ?

Le moins que l’on puisse dire est que cette élection présidentielle n’aurait été  que l’arbre qui cache la forêt. Et sous cette forêt vont se mettre à pousser de petits « champignons » toxiques dont le poison risque de ramener le pays aux troubles d’avant le coup d’Etat militaire. Et lorsque tout pourrait se dégrader, comme le fut le cas dans le passé, la communauté internationale, comme toujours ; viendrait au pompier après l’incendie ou au médecin après la mort

Laisser un commentaire