La sagesse des peuples de forêt enseigne que si l’on veut savoir de quelle manière se couche l’antilope en brousse, il n’y a qu’à regarder la position du mouton dans la basse- cour. En d’autres termes si l’on voudrait savoir le sort qui sera réservé aux partis politiques gabonais, il n’y a qu’observer ce qui se passe actuellement dans des pays comme le Niger, le Burkina-Faso, la Guinée –Conakry et le Mali. Là – bas, dans ces pays de l’Alliance du Sahel – la Guinée –Conakry n’en fait pas encore partie- dirigés par des juntes militaires, les partis politiques ont été purement et simplement dissous et leurs activités proscrites.
Au Gabon, sous un vernis démocratique, la logique est la même et d’ailleurs le Dialogue national inclusif, en réalité exclusif du mois d’avril 2024 avait annoncé les couleurs. Ce fut un procès en règle contre les partis politique, leurs prometteurs étant qualifiés de « politicards ».
Des recommandations furent faites, dont celle de réduire le nombre de partis politiques, avec en perspective une loi rétroactive (sic) qui corserait les critères de leur existence, antérieure ou future, et surtout qui les obligerait à entrer dans un des quatre moules idéologiques déterminés par les participants à ces assises. Et pourtant l’histoire des sociétés humaines montre qu’il existe de nombreux courants idéologiques. Il existe le féodalisme, le libéralisme ou le capitalisme (Féodalisme et capitalisme pouvant se combiner), la démocratie-chrétienne, le Socialisme avec ses nombreuses variantes (le marxisme, le national- socialisme qui a généré le nazisme, la social-démocratie, le social- libéralisme. On ne peut par conséquent limiter le nombre d’idéologies à quatre, sauf à méconnaitre l’histoire de l’évolution des sociétés humaines
Si l’objectif de dissoudre les partis politiques gabonais se concrétise donc, les Oyono Aba’a, Jules Mba Bekale , Jean Baptiste Obiang Etoughe, Paul Calvin Tomo, Jean Pierre Nzoghe Nguema, Abbé Noel Ngwa Nguema, Pierre Louis Agondjo Okawé, Joseph Redjembé Issiani, Moubamba Nziengui et bien d’autres encore se retourneraient dans leurs tombes, eux qui avaient souffert dans leur chair dans les années 80 pour que s’instaure la démocratie multipartite dans le pays. L’accouchement a été long et en douleur, mais cela est devenu effectif en 1990 suite à une Conférence nationale ayant débouché sur l’instauration d’un multipartisme intégral dans le pays. Et depuis lors, ce n’est pas tant l’existence de partis politiques, aussi nombreux soient-ils, qui pose problème, mais plutôt les conditions dans lesquelles les élections sont jusqu’alors organisées, la plupart des scrutins, notamment présidentiels, se soldant très souvent par des coups de force. C’est ce mal qu’il faut principalement soigner, ce d’autant plus que les partis politiques en tant que tels n’ont jamais été à l’origine des séditions ou des insurrections mettant à mal la paix sociale et la stabilité politique du pays.
On peut être d’accord sur le nombre excessif de partis dans le pays, mais c’est la loi fondamentale qui l’autorise, quand elle énonce dans son Titre I relatif aux principes et valeurs de la République : « les partis politiques et groupements de partis politiques légalement reconnus participent à l’expression du suffrage, selon les principes de la démocratie pluraliste et participative. Ils se forment et exercent librement leurs activités dans les conditions déterminées par la loi. L’adverbe « librement « a tout son sens ici. Il signifie que l’Etat n’a absolument rien à voir ni dans la manière dont se créent et fonctionnent les partis politiques et encore moins dans le choix de leurs idéologies.
Les partis politiques n’ayant ni ressources financières et humaines et ne parvenant pas à faire élire les leurs au sein des institutions républicaines mourront d’eux-mêmes sans qu’une loi ne soit prise pour les dissoudre. Ils ont survécu jusqu’à ce jour grâce au parasitage de la principale force politique qui existait, le PDG, en faisant partie des majorités aux qualificatifs divers, lesquelles constituaient la galaxie présidentielle. La disparition de cette galaxie dont l’astre était Omar Bongo Ondimba, puis Ali Bongo Ondimba, sonnera le glas de la de plupart de ces micro-partis qui essaiment le paysage politique national.